Pour l’avoir très souvent expérimentée, tous les professionnels de santé sont d’accord pour défendre l’idée que la qualité de vie au travail et la qualité des soins sont intimement liées. Les travaux menés sur la maltraitance ordinaire [1] ont pu mettre en évidence le rôle des conditions de travail et de l’organisation, dans les situations rapportées par les patients et les professionnels de santé. Pour autant, les établissements de santé restent l’objet de stratégies de rationalisation multiples, généralement instruites en silos (les achats, l’informatique, les 12 heures, la refonte des pôles, etc.), qui peinent à articuler qualité des soins et qualité de vie au travail.
Ainsi, ce qui semble une évidence dans l’intuition des professionnels doit pouvoir être situé dans un modèle d’analyse rigoureux, pour pouvoir être actionnable et s’actualiser dans une transformation efficace. Une revue de la littérature sur le lien entre qualité de vie au travail et qualité des soins [2], menée à la demande de la HAS, confirme l’existence de ce lien fort, et ce, quelle que soit la discipline qui s’est saisie du sujet (épidémiologie, sociologie, sciences politiques, sciences de gestion, santé publique, etc.).
La littérature sur la qualité des soins est riche et pluridisciplinaire mais elle réclame une analyse soigneuse pour sélectionner les travaux qui ouvrent sur des perspectives d’action. En effet, de très nombreuses recherches peuvent sembler frustrantes pour les professionnels des établissements de santé, qui ne voient pas comment mobiliser dans leurs actions au quotidien des analyses macrosociales ou individuelles. Trop souvent présentée sous l’angle des risques pour l’organisation, pour le patient et pour les professionnels de santé, la littérature ne floute-t-elle pas les actions visant à améliorer la qualité des soins, en en dressant un tableau noir certes exhaustif mais difficile à dépasser ?
Cet article propose de changer de perspective et cherche à souligner ce qui améliore la qualité des soins. En partant des modèles organisationnels existants, principalement étrangers, il analyse les facteurs de réussite de ces modèles (1re partie), et les confronte à la littérature existante sur la qualité des soins, pour en extraire les principaux déterminants (2nde partie).
Il fait bon se faire soigner dans un établissement où il fait bon vivre1
Des ressources existent, des modèles émergent, porteurs d’apprentissages et de leviers d’action pour le secteur, mais dont on tire encore trop peu d’enseignements pouvant permettre ces leviers d’action. Ces modèles rappellent quelques fondamentaux liés aux politiques ressources humaines, tels que le besoin de formation et d’accompagnement dans les parcours professionnels [3,4]. Mais au-delà de ces modalités, c’est bien plus un appel à penser autrement l’organisation du travail et à changer de culture managériale qui ressort de ces travaux.
Les hôpitaux magnétiques2
Pour reprendre l’expression d’Y. Brunelle « un hôpital magnétique est un hôpital où il fait bon vivre et où il fait bon se faire soigner », ces hôpitaux magnétiques seraient des modèles à suivre en matière de qualité, de sécurité et d’efficience pour les patients et l’hôpital [5,6].
Les travaux sur les hôpitaux magnétiques ont cherché à montrer, dès les années quatre-vingt, le lien entre un environnement interne favorable aux soignants et un faible turn-over de ceux-ci, dans un contexte où les établissements de santé peinaient à fidéliser et à recruter [7]. Depuis cette première étude, montrant que les problèmes de roulement du personnel infirmier étaient concentrés dans certains établissements, toute une série d’autres études s’est intéressée à ce modèle. Les travaux montrent aujourd’hui d’une part le lien fort entre un environnement interne favorable aux soignants et la satisfaction des patients ; et d’autre part combien ces caractéristiques magnétiques sont productrices de qualité et agissent sur les attitudes, perceptions et comportements au travail des soignants [8].
De nombreuses études ont vu le jour depuis, sur ce même thème, et toutes soulignent les huit conditions essentielles de ces hôpitaux :
- l’autonomie professionnelle des infirmiers,
- le support fourni par l’administration,
- une bonne collaboration entre médecins et infirmiers,
- la valorisation professionnelle et le leadership infirmier,
- des relations positives avec les pairs,
- un ratio de personnel adéquat,
- un focus « client » (point de départ et d’arrivée des discussions, initiatives et changements),
- l’importance de la qualité des soins et des services (qui dépasse le stade du discours).
Plusieurs études soulignent qu’en œuvrant sur ces huit variables, les hôpitaux magnétiques obtiennent des taux de mortalité plus faibles, une satisfaction plus élevée des patients [9,10], des indicateurs de soins avec de meilleurs résultats [11,12], et des erreurs médicales moindres [13,14]. Ainsi, l’amélioration des conditions de travail participe à l’amélioration de la qualité du séjour des malades à l’hôpital, et à l’amélioration de leur état de santé [15,16,17].
S’il ne faut toutefois pas occulter le contexte (américain pour l’essentiel) dans lequel les travaux sur les hôpitaux magnétiques ont été réalisés, ce qui est souligné ici, c’est combien ces hôpitaux fidélisent leur personnel, non pas tant sur des variables économiques (revenus) que sur la valorisation et le soutien, sur des incitations non économiques, et sur les conditions d’exercice du travail en lui-même. En conclusion de sa thèse, M. Sibé invite les établissements à s’inspirer de ce modèle des hôpitaux magnétiques, rappelant l’origine du concept, pour s’appuyer sur ce qui fait levier et sur les dimensions positives, plutôt que sur ce qui constitue des obstacles et des facteurs de détérioration [8].
Les communautés stratégiques
Ce concept est né au Japon, face à la nécessité d’adaptation rapide de l’activité des entreprises dans le secteur de la téléphonie, imposant des organisations souples et réactives. Les réformes successives du secteur de la santé et les évolutions contextuelles importantes rendent également nécessaire une adaptation rapide des organisations, et constituent donc un terrain propice au développement de la démarche de communauté stratégique. C’est dans ce contexte que les chercheurs de la chaire d’étude en organisation du travail de l’université de Sherbrooke ont promu, accompagné et évalué la mise en œuvre de cette démarche sur des coopérations interhospitalières.
« Une communauté stratégique est une structure temporaire de collaboration interorganisationnelle, composée de professionnels et cadres de premiers niveaux, d’omnipraticiens, de médecins spécialistes, de représentants d’organismes communautaires, etc., dont le mandat consiste à générer, à mettre en pratique et à évaluer des idées nouvelles concernant l’organisation du travail interétablissements. » [18].
Ainsi développée, cette approche a montré un apport positif sur les organisations, les professionnels et le travail en équipe. « Plus qu’une simple approche de changement, la communauté stratégique y apparaît comme une structure permettant d’accroître la capacité des organisations à concevoir et à mettre en œuvre des changements en s’appuyant sur les personnes mêmes qui réalisent le travail. » [19].
La mise en œuvre de la démarche, avec des établissements prenant en charge des patients atteints de cancers, a permis des améliorations notables, tant du point de vue des usagers que des professionnels. Le travail réalisé sur le parcours du patient a conduit la communauté à travailler sur la stabilité des équipes au sein de chacune des entités, et à la constitution d’équipes dédiées ; ce qui a également permis de faciliter les échanges entre les établissements. Au total, les participants ont fait part de leur satisfaction, et du choix de pérenniser les nouvelles organisations de travail. Ils ont également considéré que cela avait permis au personnel de « recentrer son travail sur les tâches pour lesquelles il est le mieux formé » : la répartition des tâches s’est opérée de manière plus efficace au sein des équipes, dégageant les infirmiers de certaines tâches administratives, et permettant aux autres professionnels de se sentir davantage valorisés dans leur rôle. Les usagers, quant à eux, se sont montrés moins inquiets, plus satisfaits : les motifs d’insatisfaction préalablement identifiés ont disparu [20].
Un guide a été élaboré afin de préciser les caractéristiques de cette démarche [18]. La communauté stratégique s’intéresse avant tout aux interfaces, considérant que les marges de manœuvre en interne des établissements sont trop réduites pour qu’il en résulte des changements en profondeur. Elle « s’appuie dès le départ sur ceux qui assurent le service, de manière à imaginer et mettre en place de nouvelles façons de répartir, réaliser et coordonner le travail en réseau. » [18]. De fait, cela repose sur un espace de liberté important, puisque c’est la communauté stratégique qui va analyser la problématique, décider des objectifs et des actions à mettre en œuvre, et des moyens de leur évaluation. Il s’agit donc d’une démarche avant tout centrée sur l’action. Cela passe par la mise en œuvre immédiate d’actions montrant des premiers résultats à court terme, et sur une évaluation en continu qui permet une adaptation constante. Il est intéressant de noter qu’une structure de ce type est directement rattachée à la direction générale, pour favoriser une implication des directeurs et la rapidité dans la prise de décision. Les travaux de la communauté stratégique passent ainsi potentiellement par des modifications de règles, de politiques et de pratiques, qui seront expérimentées dans les établissements partenaires, nécessitant l’approbation préalable des directions générales.
Encore confidentiel et moins étudié que le modèle des hôpitaux magnétiques, ce concept de communauté stratégique ouvre néanmoins de nouveaux horizons, et démontre surtout l’intérêt croissant des acteurs à développer de nouvelles formes d’organisation ancrées sur les questions du travail, et à progresser sur ces dernières.
Quels déterminants de la qualité des soins ?
Si l’on résume les points mis en avant par les modèles précédents, on retrouve des enseignements communs, qui font écho aux enjeux d’amélioration de la qualité des soins. Ainsi le travail d’équipe et la coopération, la mise en discussion du travail autour des professionnels de terrain, ainsi que l’autonomie dans le travail sont les éléments centraux qui participent à améliorer la qualité des soins, tout en prenant « soin de ceux qui nous soignent » [21]. Ces différents éléments appellent à changer de culture managériale.
Le travail en équipe et la coopération interprofessionnelle au cœur des services
Dans les établissements de santé, où doivent travailler conjointement différents métiers autour du patient, le travail d’équipe est décisif et incontournable pour l’organisation des soins. Il est même la clé de voûte de la qualité et de la sécurité des soins [22,23].
En premier lieu, il est mis en évidence comme soutien et protection des professionnels. Ainsi, la mauvaise qualité du travail d’équipe apparaît comme un facteur majeur associé à l’intention d’abandonner la profession ; à l’inverse, sa bonne qualité est un facteur de prévention important du burn-out [24]. Ce travail en équipe se construit à travers des espaces et des temps de collaboration, tels que les moments de transmission par exemple. Le moment de la relève, notamment, est un moment privilégié où il constitue un soutien social et émotionnel important pour les soignants [25]. Le soutien social des collègues et un minimum d’autonomie dans le travail peuvent permettre de prévenir et de gérer collectivement les risques d’agression, comme le montre une étude norvégienne sur la gestion du stress dans deux grands hôpitaux [26].
Le travail en équipe est aussi le soutien au travail réflexif. Il construit la capacité collective à réélaborer le contenu de l’activité, indépendamment des normes. Ainsi, dans les services de soins palliatifs, les professionnels ont dû notamment inventer de nouvelles règles et normes, pour éviter l’usure professionnelle et l’épuisement émotionnel, en accordant une place centrale à la subjectivité des soignants. Ils peuvent partager et exprimer leur souffrance, des temps étant réservés pour cela. L’équipe peut par ailleurs prendre le relai quand le travail devient trop difficile, constituant une protection pour le soignant [27]. Il est d’ailleurs intéressant de noter que les travaux autour du management participatif sont nés de la démarche palliative3.
Le soutien des collègues et de la hiérarchie, la connaissance spécifique de l’utilisation des équipements, et la possibilité de répondre aux questions de chaque patient favorisent la satisfaction des soignants mais également la sécurité des patients [22].
En effet, en second lieu, le travail en équipe est un levier d’amélioration de la sécurité du patient. La culture de sécurité se construit dans un contexte où le travail d’équipe est valorisé. Elle repose sur un apprentissage collectif. De fait, améliorer le travail en équipe est efficace pour améliorer autant les processus de soins que leurs résultats [28]. La littérature démontre ainsi que le travail d’équipe efficace constitue une barrière de sécurité contre les événements indésirables, est un facteur de qualité de la prise en charge du patient, est un facteur de santé et de bien-être au travail pour les professionnels, et est un moyen de répondre de manière collaborative et interdisciplinaire aux besoins du patient [29,30,31].
De manière globale, il est mis en évidence que des compétences non techniques, comme le travail d’équipe et la coopération, sont nécessaires pour améliorer la satisfaction du patient, son traitement et sa guérison, comme le montre une étude anglaise qui a filmé durant six mois en continu l’activité du service Major Trauma Centre de l’hôpital londonien St Mary’s Hospital [32].
Les infirmiers qui sont les plus satisfaits de leur travail sont ceux qui enregistrent les taux de satisfaction des patients les plus hauts et qui font le moins d’erreurs. L’orientation des services centrée sur le patient, soulignée dans les hôpitaux magnétiques, accroît significativement la satisfaction des infirmiers qui y travaillent, et a un impact positif sur les erreurs et les presque accidents, donc sur la qualité des soins [33].
Dans le cas de patients nécessitant l’intervention de différents spécialistes, des chercheurs australiens ont montré combien la communication et le travail d’équipe des soignants ont un impact positif sur la qualité des soins [34]. De même, l’équipe
d’A. Kaissi aux États-Unis a montré que la réduction des erreurs dans les soins est étroitement liée aux facteurs humains, tels que l’amélioration du travail d’équipe et la communication entre les soignants [35].
A contrario, l’analyse des causes latentes d’erreurs dans les établissements de santé a mis en évidence le rôle essentiel des questions d’organisation et de communication [36,37]. Une étude sur les erreurs en chirurgie cardiaque a notamment montré que les dangers principaux proviennent en priorité de l’absence d’une culture de sécurité, du travail d’équipe et de la communication, avant même des compétences techniques des médecins [38]. Conflits ou mauvaise ambiance, collaboration insuffisante entre soignants, supervision inadaptée des médecins, ou encore défaut de communication interne sont les raisons principales des défaillances analysées au niveau de l’équipe [39].
Ainsi, le travail d’équipe est-il un facteur d’amélioration de la qualité des soins et de la satisfaction au travail des soignants, elle-même vecteur de qualité des soins. C’est alors un cercle vertueux qui doit être pensé, permis, et soutenu par l’encadrement et le management du travail.
Le rôle de l’encadrement et du management du travail comme ressource pour permettre le travail d’équipe
De la même façon que le travail d’équipe, le rôle de l’encadrement et du management du travail [40] est une véritable ressource soulignée par les soignants. Les salariés se plaignent davantage d’une absence de leur hiérarchie plutôt que d’une trop grande présence [41]4. Les soignants ont besoin d’être écoutés et entendus par leurs cadres de santé [23,42], et ils attendent de ces derniers qu’ils soient disponibles à tout moment [42].
La mise en discussion du travail réel et des difficultés des soignants et des encadrants peut permettre les ajustements nécessaires et une amélioration de la qualité du travail. Entre les normes prescrites et le travail réel, des jeux avec les règles, « mécanismes naturels d’équilibrage » opèrent [43]. Un travail de régulation conjointe s’exerce, entre la régulation de contrôle (c’est-à-dire les règles édictées par la direction et l’administration) et la régulation autonome (c’est-à-dire la façon dont les soignants vont faire le travail demandé en s’adaptant au plus près des besoins et des moyens dont ils disposent). Le management doit alors accompagner ce travail de régulation car la qualité des soins en dépend [41,44].
Les travaux de P. Colombat, menés en oncohématologie, ont mis en exergue l’importance du management en général sur le bien-être ou la souffrance des soignants, et plus particulièrement l’impact positif du management participatif sur les équipes : il favoriserait le travail en équipe, la reconnaissance du travail et le soutien de chacun5 [45,46].
En matière de management enfin, l’autonomie des soignants est déterminante dans leur capacité d’agir. Les analyses de R. Karasek sur le stress au travail montrent bien toute l’importance de l’autonomie (latitude décisionnelle), dans le vécu que le travailleur peut avoir, au moment de prendre une décision ou même de faire son travail plus simplement [8,16].
Le fait de laisser une plus grande liberté d’action diminue en fait le taux de rotation des soignants : c’est un facteur de satisfaction [47]. Par ailleurs, les salariés qui font face à une forte demande psychologique mais qui disposent d’une bonne latitude décisionnelle sont davantage protégés en matière de risques psychosociaux, comme le montrent les résultats de l’enquête Sumer en France [48]. De son côté, M. Battesti propose d’accroître l’autonomie des soignants pour lutter contre l’absentéisme [49].
Les démarches qualité peuvent, sur ce point, parfois venir bousculer les rapports au travail préexistants, et la culture professionnelle existante. Elles peuvent ainsi instaurer notamment une formalisation des pratiques et donner un caractère « procédural » au travail, qui peut venir notamment « bousculer le principe d’indépendance des médecins » [50]. Ce n’est alors pas tant le fond de la démarche qualité que sa forme et la survalorisation de l’écrit qui peuvent freiner son appropriation [51].
Ainsi, le management est non seulement indispensable pour améliorer le bien-être des professionnels, mais il est également déterminant en ce qu’il concerne la qualité des soins, et notamment l’appropriation des démarches d’amélioration continue de la qualité. En effet, les cadres intermédiaires sont les seuls à pouvoir transmettre le sens de ces démarches, afin qu’elles ne soient pas vécues comme des contraintes désincarnées, mais qu’elles soient mises en discussion et puissent être comprises, et intégrées efficacement à l’activité quotidienne.
Plusieurs études et recherches ont montré combien, lorsque l’encadrement initie, permet et soutient la mise en discussion du travail, la performance (ici la qualité des soins) s’accroît, tout autant que la santé des professionnels. La mise en discussion du travail est en effet créatrice de sens et d’intelligence collective [52] ainsi que d’innovation quotidienne [53], dès lors qu’elle est pensée et organisée avec les professionnels de santé, et ce, de manière interprofessionnelle. Les travailleurs souffrent avant tout de ne pas pouvoir faire un travail de qualité [54], et tous ont une expertise fine à partager du travail réel, tel qu’il se fait quotidiennement dans les services (les savoirs expérientiels).
Sans cela, l’implémentation des démarches qualité peut poser problème, par exemple en raison de la façon dont elles sont traduites par le management [55]. La généralisation des indicateurs qualité se fait plutôt de façon verticale, et même s’ils font maintenant partie intégrante du métier pour un certain nombre de soignants devenus familiers de ces procédures, ils restent néanmoins encore souvent perçus comme un « domaine réservé » aux experts, et l’apprentissage se fait, là aussi, plutôt sous contrainte [56]. Au final, les démarches de qualité, mises en place pour améliorer la qualité des services rendus, peinent à être appropriées par certains professionnels, notamment en raison d’un manque de discussion et de confrontation des points de vue. Il est alors urgent de développer « des espaces propices à l’apprentissage collectif, misant sur les acteurs non comme étant à convaincre de la nécessité d’un changement imposé par l’environnement ou par les risques, mais comme étant capables d’une contribution créatrice de valeur et d’innovations sociales » [57]. Sans cela, les patients ne seront pas perçus comme étant les bénéficiaires de ces mesures, et les démarches qualité resteront associées au besoin de renseigner les tutelles, perçues comme bureaucratiques, servant avant tout des besoins de régulation [56].
Conclusion
La qualité de vie au travail est présentée comme un concept multidimensionnel, s’intéressant à la fois aux questions du travail, de son organisation, de l’égalité homme-femme, de la conciliation vie privée et vie professionnelle. Ainsi, des actions promouvant la qualité de vie au travail portent parfois des éléments à la périphérie de la vie professionnelle : crèche, transport, conciergerie… Pourtant les travaux présentés ci-dessus démontrent, s’il en était besoin, que le cœur de la qualité de vie au travail reste le travail lui-même nous invitant, comme Y. Clot l’affirme, à considérer que qualité de vie au travail et qualité du travail sont superposables [54]. L’enjeu dans les années à venir est bien de déployer un nouveau modèle managérial, cherchant à redonner une place aux questions du travail dans les décisions de gestion des établissements.
Note
1- Selon l’expression d’Y. Brunelle [5].
2- Voir l’article de P. François et al. p. 40 dans ce numéro.
3- Voir l’article de P. Colombat et al. p. 30 dans ce numéro.
4- Pour en savoir plus : Babeau O, Chanlat JF. La transgression, une dimension oubliée de l’organisation, Revue française de gestion 2008; 183, 201-219. Cité par Detchessahar et Grevin [41]. Accessible à : https://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion-2008-3-page-201.htm (Consulté le 14-02-2018).
5- Voir également l’article de P. Colombat et al. p. 30 dans ce numéro.