21 octobre 2022

Le Safety-II a-t-il enterré le Safety-I ? Deuxième épisode

Relatively new to Safety, Resilience Engineering (RE) is known by various pseudonyms: Safety-II, Human & Organizational Performance (HOP) and Safety Differently. Collectively termed New-View, they have created a stir amongst OSH practitioners by challenging them to view key areas of occupational Safety in a different way: [1] how Safety is defined; [2] the role of people in Safety; and [3] how businesses focus on Safety. When subject to critical scrutiny, New-View’s major tenets are shown to be a collection of untested propositions (ideas, rules, and principles). New-view’s underlying RE philosophy is predicated on repeatedly testing the boundary limitations of systems until a failure occurs, which paradoxically requires more risk controls that create the very problems New-View criticizes and attempts to address – constraints, complexity, rigidity, and bureaucracy. This continuous threat-rigidity cycle indicates New-View’s raison d’etre is somewhat circular. New-View entirely lacks any new associated practical methodologies for improving Safety performance: it uses traditional Safety-1 methodologies to tackle actual Safety problems. Moreover, no published, peer-reviewed empirical evidence demonstrates whether or not any aspect of New-View’s propositions are valid. Currently we don’t know how, or if, New-View improves Safety performance per se, or if it reduces or eliminates incidents/injuries. The extant Safety-1 literature suggests that New-View’s propositions lack substance. The inescapable conclusion, therefore, is "the emperor has no clothes" and that ideology and emotion has triumphed over science and practice. It is also clear that the OSH profession has an immense crisis of ethics across its entire landscape.

Commentaire du Dr Marius Laurent (PAQS)

  • Le fait que Cooper lit les théories qu’il discute au travers du prisme de la sécurité au travail (occupational Safety) n’ôte rien à la pertinence de certains de ses arguments si on les lit comme nous au travers de celui de la sécurité du patient. Il présente les thèses (ou une partie d’entre elles) d’Hollnagel, de Conklin et de Dekker. Je suis plus réservé sur sa critique de la surévaluation de la complexité chez ces auteurs : il admet du bout des lèvres que cela peut se justifier dans le monde de l’aviation, mais pas dans la sécurité au travail en général. Pas un mot de l’hôpital, qui semble pourtant être le parangon de l’organisation complexe. Sa première remarque porte sur le flou des définitions qu’Hollnagel (Safety-II, resilience engineering) donne de ses points de vue. Il en va de même pour Dekker (Safety differently) et pour Conklin (moins connu : il est expert en facteurs humains et en sécurité au Los Alamos National Laboratory). Il reprend les trois sous le terme de « new vue ». Même si des constantes peuvent être soulignées, la new vue est pour lui davantage une vision qu’une théorie étayée par les faits (importance de se pencher sur les réussites et pas seulement les échecs, cesser de voir l’homme comme une source de problèmes, mais comme source de progrès, considérer la sécurité comme un devoir éthique, et non comme le produit d’une gestion procédurale bureaucratique, par exemple). Il oublie que la « défense en profondeur », exemple de la « old vue » a connu un beau nombre de définitions et de représentations graphiques avant de se stabiliser dans l’image à succès des tranches de fromage suisse et reste une notion controversée. Vue de la sorte, la new-vue ressemble un peu à un objet de marketing (académique ?) s’appuyant sur des propositions attendant des preuves. Il résume un peu crûment l’article de Patriarca qui revoit 472 articles sur le resilience engineering, « et n’en trouve pas un seul qui prouve son efficacité » alors que ce n’est pas l’objectif de cette revue1… Cooper cherche vertueusement ce qui peut rapprocher les deux visions de la sécurité si on cesse de les considérer comme mutuellement exclusives, ce qu’Hollnagel n’a jamais prétendu d’ailleurs. La critique du manque de preuve de l’existence d’un progrès en sécurité si on adopte la new-vue est fondée, mais se heurte au fait que cette absence de preuve n’est pas la preuve de son inefficacité. Bien des interventions « classiques » en sécurité attendent toujours la preuve convaincante de leur utilité, des années après leur adoption universelle.

Cooper MD. The emperor has no clothes: a critique of Safety-II. Saf Sci 2022;152. Doi : 10.1016/j.ssci.2020.105047.

Note :

1- Patriarca R, Bergström J, Di Gravio G, et al. Resilience engineering: Current status of the research and future challenges. Saf Sci 2018;102:79-100.