Synthèse des réponses
- Le protocole médical est tout à fait possible
et s’appuie sur les articles R. 4311-7 et 8 du code
de la santé publique (CSP) et du Code de déontologie infirmier (article 4312-43). - C’est une prescription médicale.
- Il doit être validé par son auteur et réévalué annuellement.
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L’article L1110-5 du Code de la santé publique (CSP) stipule que « toute personne a le droit de recevoir des soins visant à soulager sa douleur. Celle-ci doit être en toutes circonstances prévenue, évaluée, prise en compte » dans les meilleures conditions de sécurité. Compte tenu de leur proximité avec les patients, les personnels infirmiers (IDE) ont un rôle central dans cette prise en charge comme le précise l‘article R4312-19 du CSP : « L’infirmier a le devoir, dans le cadre de ses compétences propres et sur prescription médicale ou dans le cadre d’un protocole thérapeutique, de dispenser des soins visant à soulager la douleur ». Pour pouvoir y faire face quand un médecin n’est pas disponible pour une prescription en temps réel, il existe deux possibilités : le protocole anticipé et la prescription conditionnelle.
Le protocole anticipé est une prescription qui peut être appliquée à un ou plusieurs patients. À ce titre, conformément à l’article R4311-8 du CSP, elle doit être datée et signée par un médecin et tracée dans le dossier de soins infirmiers. Pour la Haute Autorité de santé (HAS), sa rédaction est pluriprofessionnelle, revue annuellement. Elle est diffusée à l’ensemble des professionnels [1].
La prescription conditionnelle ne s’applique qu’à un seul patient. Sa mise en œuvre est fonction de l’évaluation de la douleur. Ainsi, le paracétamol est efficace sur les douleurs faibles à modérées, correspondant à une douleur cotée entre 1 et 3 sur une échelle visuelle analogique (EVA). La prescription précise la dose unitaire, le délai minimum entre deux prises, la dose maximale par 24 heures et la durée de la prescription [1]. Cette dernière prescription est la plus adaptée au traitement de la douleur aiguë.
Les deux modalités nécessitent un travail tripartite entre personnel infirmier, pharmaciens et médecins pour des conditions d’application prenant en compte les contraintes de chaque groupe professionnel et la sécurité des patients.
Il n’existe pas de données sur l’efficacité et la sécurité des patients pour les protocoles anticipés. En ce qui concerne la prescription conditionnelle, les données sont rares et disparates. Elles ne permettent pas de conclure à la sécurité des patients mais suggèrent un faible niveau d’identification des événements indésirables qu’elle génère [2]. Si la rédaction et la diffusion de recommandations locales en service de psychiatrie améliorent un peu la sécurité des patients, elle réduit la traçabilité de l’administration [3]. En institution pour personnes âgées dépendantes, les données sont également rares et les études peu comparables [4]. Le recours à ce type de prescription y est très répandu, d’autant plus que le séjour dans la structure est prolongé. Il apparaît également que peu des médicaments prescrits sont effectivement administrés. En outre, peu de données sont disponibles sur les risques liés à la polymédication en rapport avec ce mode de prescription.
Le rôle des IDE est donc central et conforme à la réglementation en vigueur. Les IDE contribuent à la qualité et à la sécurité de l’administration des médicaments, notamment des antalgiques, en évaluant la douleur ; en veillant au respect de la prescription ; en repérant les possibles interférences médicamenteuses et en signalant les éventuels effets indésirables. Pour cela, le respect de la traçabilité de l’administration et la contribution à l’actualisation de la prescription sont indispensables et justifient une formation continue à ces modalités thérapeutiques.
Références
1- Haute Autorité de santé (HAS). Évaluation de la prise en charge médicamenteuse selon le référentiel de certification. Saint-Denis : HAS, mars 2022. Accessible à : https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2020-12/fiche_pedagogique_pec_medicamenteuse.pdf (Consulté le 28-08-2024).
2- Vaismoradi M, Amaniyan S, Jordan S. Patient safety and pro re nata prescription and administration : a systematic review. Pharmacy. 2018;6(3):95. Doi : 10.3390/pharmacy6030095.
3- Baker JA, Lovell K, Harris N. The impact of a good practice manual on professional practice associated with psychotropic PRN in acute mental health wards : an exploratory study. Int. J. Stud. 2008;45(10) :1403-1410.
4- Dörks M, Allers K, Hoffmann F. Pro re nata drug use in nursing home residents : a systematic review. J Am Med Dir Assoc. 2019;20(3):287-293.e7. Doi : 10.1016/j.jamda.2018.10.024.